Tour d’horizon de l’avenir européen de la mobilité

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CARA vous propose de faire un tour d’horizon sur l’avenir européen de la mobilité. Nous vous présentons les grands travaux réglementaires et l’analyse des programme de recherche européens, afin de mieux comprendre ces changements pour chacune des filières CARA.

Introduction

En fin d’année 2020, la DG MOVE (Direction générale de la mobilité et des transports, un service de la Commission européenne) a publié la stratégie européenne concernant le futur des secteurs du transport et de la mobilité. Celle-ci se résume en trois axes :

  • Une mobilité durable ;
  • Une mobilité plus intelligente ;
  • Une mobilité résiliente

En effet, en 2019, la Commission européenne présentait son Green Deal (ou « pacte vert pour l’Europe ») et se fixait comme objectif d’atteindre au sein de l’Union la neutralité carbone d’ici 2050. Elle se fixait également comme objectif de mi-parcours, de réduire ses émissions de GES (Gaz à Effet de Serre) de 55% d’ici 2030 avec son paquet législatif Fit-fo-55. Afin d’atteindre ces objectifs, chaque secteur de notre économie se doit de se transformer dans le but de se décarboner. De plus, la pandémie de covid-19 ainsi que la guerre en Ukraine ont également mis les européens face à la réalité de leur dépendance aux exportations de matériaux, d’énergie et de technologies étrangères, faisant apparaître un second chantier de transformation. La « durabilité », l’« intelligence » et la « résilience » sont de ce fait devenues les maîtres mots de la stratégie européenne pour son avenir.

Ainsi, la DG MOVE n’échappant pas à ce mouvement global, a orienté sa stratégie autour de ces trois nouveaux pivots.
Concernant la durabilité, l’objectif est d’atteindre une réduction des émissions de GES du secteur des transports de 90% d’ici 2050, ce qui passera par le développement et le déploiement de véhicules zéro-émission dans tout type de transport. De plus , les villes européennes sont appelées à développer des politiques locales en ce sens (notamment avec l’adoption de SUMP), une dynamique mise en avant par l’initiative « Villes neutres pour le climat et intelligentes » dont Lyon ou Grenoble font partie . Également, le transport par voie ferrée et par voie fluviale sont appelés à largement augmenter leur part dans le transport en Europe.

Sur le sujet de l’intelligence, l’utilisation des données et la numérisation sont placées au coeur de la stratégie de la DG MOVE. Elles doivent notamment permettre d’automatiser au maximum le secteur du transport de personnes, de virtualiser celui du transport de biens et permettre le déploiement de véhicules autonomes en Europe.

Enfin, concernant l’axe de la résilience, de grands investissements sont entrepris dans les infrastructures de transports européennes (rénovation, amélioration, construction…) avec pour objectif de rénover et de compléter la totalité du réseau RTE-T d’ici 2050.

Si ces grandes lignes directrices indiquent clairement les orientations prises par la mobilité en Europe, il reste cependant plus intéressant de s’attarder sur les grands travaux réglementaires en cours au sein des institutions européennes qui doivent maintenant appliquer cette stratégie. De plus, les objectifs de recherche et d’innovation exprimés au travers des divers programmes de recherche européens peuvent également nous éclairer sur les technologies prisées par l’Europe pour opérer cette transition.

Sommaire : tour d’horizon de l’avenir européen de la mobilité

Véhicule industriel

Travaux réglementaires

Concernant tout d’abord les secteurs de l’automobile et du véhicule industriel, plusieurs grands sujets sont actuellement en discussion à Bruxelles.

Le premier grand dossier occupant l’esprit des parlementaires bruxellois est le règlement sur les émissions de CO2 des véhicules légers visant à flécher le parcours de transition de ce secteur. Ce règlement réuni quatre importants chantiers qui divisent au sein des institutions :

  • La fin des véhicules thermiques ;
  • Les objectifs devant être fixés à l’horizon 2030 en termes de réduction des GES ;
  • La fin (ou non) du bonus accordé aux constructeurs atteignant leurs objectifs de réduction des émissions ;
  • Le rôle devant être donné aux véhicules hybrides rechargeables ainsi qu’aux carburants alternatifs dans le processus de transition du secteur vers le zéro-émission.

Sur la fin des véhicules thermiques tout d’abord, la date faisant consensus à la Commission européenne ainsi qu’aux Parlement est celle de 2035, bien que des amendements ait été déposés afin de retirer cet objectif ou à l’inverse de l’avancer à 2025 (le vote de la commission de l’Environnement aura lieu le 11 mai à ce sujet). Concernant les objectifs de mi-parcours, ceux de 2030, le Parlement a retoqué la proposition de la Commission afin de fixer des objectifs plus ambitieux, comme la réduction de 75% des émissions de GES des flottes de véhicules légers des constructeurs automobiles contre 55% proposés par la Commission. Sur le bonus accordé aux constructeurs, celui-ci devrait visiblement disparaître en 2030 (volonté de la Commission) voir en 2025 (position actuelle du Parlement). Enfin concernant les véhicules hybrides et les carburants alternatifs, les deux institutions semblent s’accorder sur le fait que ceux-ci ne doivent pas être soutenus et que la fin des moteurs thermiques d’ici 2035 inclue automatiquement la fin des hybrides thermiques. De même, les carburants alternatifs ne devraient recevoir aucun avantage de la part de l’Europe comme l’indique le projet de rapport du Parlement.

Autoroute

Le second grand dossier est celui de le règlement sur le déploiement des infrastructures pour carburants alternatifs, ce qui concerne surtout les bornes de recharge électrique, le déploiement de bornes hydrogènes et de bornes GNL (Gaz Naturel Liquéfié). Ce règlement viendra abroger la précédente directive de 2014 sur les infrastructures pour carburants alternatifs. Elle est d’autant plus importante, que beaucoup pensent que le déploiement de ces infrastructures entrainera dans son sillage une conversion des consommateurs et des professionnels aux véhicules zéro-émission. En ce qui concerne l’ensemble des véhicules (voitures et camions ici) les deux principaux sujets de débats sont la distance maximale entre les stations de recharge ainsi que la puissance de celles-ci :

  • Sur la distance maximale entre deux stations, la Commission et le Parlement se sont accordés sur 60km maximum pour les bornes électriques. Pour les bornes d’hydrogène sous pression ou liquide, la Commission souhaite fixer la distance à 150km (hydrogène sous pression) et 450km (liquide) mais le Parlement lui préfère fixer à 100km et 400 km. Pour les infrastructures de recharge de GNL, le Parlement a considéré que ce carburant n’est pas compatible avec les objectifs de l’Union et a donc supprimé toute obligation à ce sujet (la Commission souhaitant, elle, imposer des objectifs en la matière aux Etats pour les poids lourds). Concernant le délai, la Commission table sur une atteinte de ces objectifs d’ici 2030, ce sera 2027 pour le Parlement.
  • Au sujet de la puissance des bornes de recharge électrique là aussi, le Parlement souhaite aller plus loin que les propositions de la Commission. Pour les véhicules légers, le minimum de puissance de la borne de recharge est réhaussé de 1 kW à 3 kW minimum et chaque parc de recharge devra être doté d’une capacité de recharge de 600 kW minimum au lieu de 300 kW d’ici 2025. Pour les poids-lourds également, les exigences sont globalement doublées par le Parlement et les dates avancées

Concernant la question environnementale, il faut également garder à l’esprit que la norme Euro 6 devrait prochainement remplacée par la norme Euro 7 qui entrera normalement en vigueur en 2025 (cette dernière est toujours en cours de préparation). Cette norme, qui entrera donc dans sa 7ème version, vise à réduire les émissions de particules polluantes et nocives des véhicules thermiques. Cette nouvelle génération devrait être plus restrictive que ses prédécesseurs et elle pourrait potentiellement comprendre les émissions des véhicules électriques (jusque là absentes). Les différents observateurs du secteur gardant un œil sur cette norme en devenir, s’accordent à dire que celle-ci vise à dors et déjà poussé les constructeurs à se tourner vers les véhicules électriques, ce qui reviendrait finalement à anticiper la fin des moteurs thermiques.

Enfin un dernier grand chantier concerne les données et le véhicule autonome, deux notions indissociables. En effet dans le secteur de l’automobile en particulier, la question de l’accès et du partage des données qui est un thème assez général pour l’Union Européenne, s’invite dès que l’on commence à évoquer le véhicule autonome. En matière de données, la Commission européenne a par ailleurs, soumis au Parlement le Data Act, une nouvelle initiative transverse qui devrait mener à un plus grand partage des données par les entreprises privées aux organismes publics. Sur la question des véhicules autonomes en particulier, l’Europe cherche à concentrer les efforts de la recherche et du développement de nouvelles technologies. Elle devrait par la suite, chercher à créer un cadre harmonisé qui est le corolaire du déploiement des véhicules autonomes dans toutes l’Europe de manière égale et coordonnée. Cela devrait se traduire dans les deux ans à venir, à minima par une révision :

  • Du règlement relatif au cadre d’homologation des véhicules ;
  • Du règlement d’exécution modifiant le règlement d’exécution (UE) 2020/683 (disposition administrative pour le règlement d’homologation (UE) 2018/858) en ce qui concerne les modèles de fiche de renseignements, de certificat de réception par type de l’UE et de système de numérotation afin de tenir compte des évolutions réglementaires en ce qui concerne le règlement GSR.

Nous devrions donc assister à une accélération du rythme de transformation de ces secteurs, la volonté de l’Europe étant très clairement d’engager des travaux réglementaires en profondeur pour faciliter le déploiement de nouveaux véhicules zéro-émissions en préparant le terrain pour leur arrivée.

Recherche, innovation & partenariats

En matière d’automobile et de véhicules industriels le programme-cadre de Recherche et d’Innovation le plus important de l’Union Européenne reste Horizon Europe (successeur du programme H2020), un programme au spectre large doté d’une enveloppe de 95,5 milliards d’euros sur 2021-2027. En particulier, le Cluster 5 de ce programme « Climat, énergie et mobilité » est pleinement dédié à la recherche et à l’innovation dans le secteur du transport. Il comprend dans ses Destinations 2, 5 et 6 un grand nombre d’appels à projets dotés d’enveloppes de plusieurs millions d’euros et généralement dédiés au développement de technologies ayant déjà fait leur preuve.

En ce sens, et finalement en parallèle des efforts réglementaires en cours, le véhicule électrique et les technologies hydrogènes en lien avec le transport sont les plus développés par ce programme. Un effort de recherche considérable est encouragé afin de développer des véhicules de demain non-polluants ce qui concerne principalement la partie motorisation (développement de nouvelles batteries ou amélioration des technologies existantes, développement de véhicules hydrogènes) notamment concernant les poids lourds qui accusent un certain retard en la matière contrairement aux véhicules légers. Par ailleurs, le retrofitting de véhicules thermiques est un sujet particulier qui est aussi largement abordé pour répondre à ces problématiques.

Le véhicule autonome est également abordé par le programme Horizon Europe mais dans un aspect plus centré sur les données de leur gestion à leur utilisation et des tests concernant les différents niveaux d’autonomisation (la recherche est actuellement dans la phase de démonstration). Les données sont également au cœur d’un autre volet important de cette partie du programme, particulièrement en lien avec le secteur de la logistique et la gestion de flottes de véhicules. Là aussi, l’optimisation de l’utilisation des véhicules par une meilleure gestion des données est perçue comme un moyen d’atteindre les objectifs de l’Union en matière de réduction des émissions.

Enfin, la recherche est également accompagnée, encouragée et encadrée par divers partenariats publics-privés au niveau européen. Ces derniers ont pour rôle de mobiliser les parties prenantes de leurs secteurs d’activités autour d’objectifs communs afin de concentrer aux mieux les efforts de la recherche et éviter l’éparpillement des moyens et des savoirs. Trois d’entre eux en particulier dans les secteurs de l’automobile et du véhicule industriel jouent un rôle important :

  • 2ZERO (Towards zero emission road transport) :  un partenariat dédié au développement de véhicules zéro-émission, particulièrement les véhicules électriques à batterie ainsi que les véhicules électriques à pile à combustible.
  • CLEANH2 (Clean Hydrogen Joint Undertaking) : ce partenariat se focalise sur le secteur de l’hydrogène en général, mais ses actions se recoupent également avec les secteurs du transport et de la mobilité.
  • CCAM (Connected, Cooperative & Automated Mobility) : un partenariat concernant en assez grande partie le véhicule autonome, mais aussi la gestion des données (de leur exploitation à leur utilisation) majoritairement autour de l’automobile et des véhicules industriels.

Il est important de rester au fait de l’activité de ces derniers, car leur rôle structurant pour la recherche implique notamment la co-écriture d’appels à projets (rattachés au programme Horizon Europe) ciblés mais aussi l’animation des filières respectives en identifiant leurs besoins (ces partenariats jouent un rôle consultatif auprès de la Commission).

Ferroviaire

Travaux réglementaires

Le secteur ferroviaire a connu depuis un an environ un engouement renouvelé de la part de l’Europe, et est présenté comme une pièce majeure dans le plan de réduction des émissions de GES par les institutions européennes. En effet, devant le temps trop conséquent que demande la décarbonation du secteur du transport routier (aussi bien celui des biens que celui des personnes), le train est perçu non seulement comme une alternative viable, mais surtout une alternative déjà à notre portée qui doit donc être mieux exploitée et développée.  

C’est notamment pour cette raison que 2021 fut officiellement déclarée « année du rail » en Europe. Ces dernières années, les institutions européennes ont en effet fait leur possible pour mettre en avant le ferroviaire et attirer dessus l’attention des européens. En ce sens, il avait été adopté un nouveau règlement renforçant les droits des voyageurs empruntant le train, et surtout la révision du RTE-T (sur laquelle nous reviendrons plus tard) qui devrait visiblement faire une place importante au secteur ferroviaire.

Le transport par rail (le transport ferroviaire)

Le grand chantier réglementaire actuel concernant le transport ferroviaire reste cependant le sujet de l’électrification des lignes (en Europe seul 54% des lignes seraient électrifiées). Car si en effet le réseau est déjà en place sur la majeure partie du territoire européen, il n’est pas complétement moderne. Dans les débats qui ont toujours lieu actuellement, plusieurs hypothèses sont avancées par les groupes politiques européens :

  • Rendre obligatoire l’électrification des lignes ferroviaires d’ici 2030 ;
  • Prévoir une couverture minimale en termes de bornes de recharge pour les trains à batteries (ce qui éviterait donc de devoir électrifier tout le réseau) ;
  • Prévoir cette même couverture pour les trains fonctionnant à l’hydrogène.

Paradoxalement, le ferroviaire semble quand même quelque peu délaissé pour le moment par le Parlement européen et la Commission européenne (concernant le texte sur les carburants alternatifs traité dans la partie « automobile & véhicule industriel », le rail n’apparaissait pas). Peu d’initiatives marquantes ont été entreprises (si ce n’est la fameuse année du rail dont les résultats restent mitigés) et on peut avancer l’idée que les différences de fonctionnement d’un Etat à l’autre viennent freiner les ambitions européennes dans un secteur manquant peut être de libéralisation (comme sur l’ouverture de l’exploitation des lignes de chemin de fer à la concurrence qui est loin de faire l’unanimité parmi les Etats membres).

Recherche & innovation

Concernant le secteur ferroviaire, la recherche européenne se structure principalement autour du partenariat public-privé Europe’s Rail (anciennement Shift2Rail) dont les appels à projets restent inclus dans le programme Horizon Europe.

Ce « nouveau » partenariat a par ailleurs publié récemment sa première vague d’appels à projets. Ces deniers sont désignés comme étant des appels à projets structurants par et pour le partenariat et dévoile donc l’orientation de la recherche européenne en la matière pour les années à venir :

  • Une meilleure gestion du réseau ferroviaire dans le but de faciliter son intégration dans l’environnement multimodal du transport ;
  • Développement des trains autonomes ;
  • Rendre le secteur plus compétitif économiquement avec une amélioration du coût de ses services et une meilleure utilisation/intégration des technologies numériques et de l’IA ;
  • Continuer d’innover afin de réduire l’emprunte carbone du secteur dans son ensemble ;
  • Continuer la numérisation des services en lien avec le fret ferroviaire ;
  • Innover dans la manière d’utiliser les lignes capillaires du réseau ferroviaire ;

Le spectre d’innovation visé est donc ici encore une fois assez large et englobe bien la totalité du secteur étant donné que la partie infrastructure liée au secteur est traitée dans les appels à projets du programmes CEF (un programme transversal à la quasi-totalité des filières que vous trouverez en fin de page).

Transport fluvial

Travaux réglementaires

Le secteur du transport fluvial est peut-être le secteur qui présente le moins d’activités réglementaires ou législatives à l’échelle européenne ces dernières années et dans un avenir proche. Hormis la révision du RTE-T qui concerne également les secteurs automobile, véhicule industriel et ferroviaire, le transport fluvial ne connait pas de grands changements. Il occupe cependant le même statut que le secteur du ferroviaire, celui d’un secteur dont les axes sont (de toute évidence) déjà tracés et en partie aménagés, avec des solutions aux plus grandes capacités volumiques que le secteur du transport routier.

Bateau fluvial

La révision d’une directive vieille de plus de 15 ans pourrait cependant quelque peu remettre en avant le secteur en s’attaquant à ce qui lui est le plus souvent reproché : sa lenteur. En effet, la Commission européenne a annoncé qu’elle engagera cette année une révision de la directive de 2005 relative au RIS (Radiology Information System) du réseau fluvial européen. Cette révision devrait permettre plusieurs choses. Tout d’abord, une harmonisation des systèmes européens (dans la continuité de ce qui avait été fait en 2005) afin d’éviter que ce secteur pour l’instant sous-utilisé ne soit pas compliqué à pratiquer pour les armateurs et les transporteurs (notamment en réduisant la charge réglementaire). Ensuite, des efforts de numérisation des systèmes devraient être demandés afin de faciliter l’intégration du réseau fluvial dans les nœuds logistiques avec d’autres modes de transport en rendant les données plus accessibles. Enfin, cette révision devrait permettre la mise en place de systèmes plus harmonisés et donc plus synchronisés ce qui devrait rendre possible une meilleure gestion des flux sur le réseau fluvial et également un meilleur suivi de ses performances.

Recherche & innovation

D’une manière assez semblable au secteur ferroviaire, le milieu de la recherche européenne du secteur fluvial se structure en grande partie autour d’un unique partenariat public-privé : ZEWT (Zero-Emission Waterborne Transport). Cependant, ce partenariat traite également du transport maritime (et pas seulement du transport fluvial) qui est souvent un peu plus mis en avant. Cela s’explique notamment par le fait que le transport maritime est un secteur bien plus polluant que le transport fluvial à l’heure actuelle, les efforts de recherche sont donc plutôt concentrés dans ce secteur. Mais de toute évidence, les deux secteurs restent cependant fortement liés et la plupart des appels à projets proposés permettent de développer des solutions ou de faire de la recherche dans l’un, l’autre, voir les deux secteurs à la fois.

Les derniers appels à projets publiés par ce partenariat (qui se sont clôturés en 2021) laissent deviner une orientation de la recherche se concentrant principalement sur la réduction des émissions de GES des navires :

  • Electrification des moteurs mais également des équipements des navires ;
  • Amélioration des navires fonctionnant aux GNL afin de limiter les pertes et écoulements ;
  • Travaux préparatoires pour le déploiement de bornes de recharge sur le réseau fluvial pour les carburants alternatifs ;
  • Développement de solutions de retrofitting ;
  • Développement de jumeaux numériques pour les modèles de navires.

Encore une fois tout comme le secteur ferroviaire, l’infrastructure du réseau fluvial est, elle, principalement traitée par les appels à projets du programme CEF sur lesquels nous reviendrons.

Mobilité active

Travaux réglementaires

En dehors de certains sujets et programmes transverses qui seront traités plus bas, le secteur de la mobilité active ne connait pas de grands chantiers réglementaires ou législatifs lui étant propre. De manière assez générale, la mobilité active est généralement incrémentée dans la mobilité urbaine, à tort ou à raison, par les instances européennes. On peut prendre à titre d’exemple, le nouveaux Cadre de la Mobilité Urbaine publié par la Commission en décembre 2021 visant à réduire les émissions de GES dans les espaces urbains et à en augmenter la qualité de vie. Ce nouveau cadre de travail fait la promotion de la mobilité active dans le milieu urbain comme étant l’un des points importants de travail pour les villes européennes (notamment dans leur SUMP) devant mettre en place le plus rapidement possible des solutions de déplacement zéro-émission.

Si la mobilité active ne jouit donc pas d’une attention particulière des législateurs européens, elle reste tout de même identifiée comme étant un outil efficace de réduction rapide des émissions de GES dans les espaces urbains. En ce sens, elle est souvent mise en avant dans ces textes plutôt transverses et même placée aux cœur de ceux-ci.

Recherche & innovation

Si la mobilité active est ainsi incrémentée dans la mobilité urbaine, elle fait donc également figure de solution concernant les problématiques lui étant liées. Ce n’est donc pas une surprise si la plupart des programmes européens présentent tous une part de leurs appels à projets dédiés à la mobilité active. De manière générale, les appels à projets en lien avec la mobilité active tournent autour, d’une part, des questions de logistique urbaine afin de remplacer les véhicules polluants classiques de ce secteur (notamment sur la question de la logistique du dernier kilomètre), et d’autre part de l’aménagement ou le réaménagement de voies et infrastructures dédiées aux modes transport de la mobilité active (pistes cyclables, zones de stationnement sécurisées et/ou de recharge pour les véhicules à assistance électrique, parkings relais…etc…).

La mobilité active, de part son caractère transverse et sa mise en avant se retrouve donc dans de nombreux programmes tels que les plus classiques comme Horizon Europe (notamment dans initiatives spécifiques tel que CIVITAS), mais aussi dans les programmes particuliers comme ceux des Interreg ou encore de l’EIT Urban Mobility.

Enfin, il ressort de ces appels à projets et programmes que la mobilité active est perçue comme une solution efficace de remplacement dans le cadre de la logistique urbaine, et un fort vecteur de réduction des émissions polluantes en ville.

Transport par câble

Travaux réglementaires

Le transport par câble est un secteur particulier souvent rattaché au secteur du transport aérien. Cependant, ce moyen de transport possède bien entendu sa réglementation propre et l’Europe est par ailleurs leader mondial dans ce secteur industriel (environ 90% de l’industrie mondiale selon la Commission). Du fait de cette maturité, la réglementation ne connait que peu de changements mais elle permet ainsi aux acteurs du secteur d’aborder les nouveaux marchés (dont ceux au sein de l’Union) de manière sereine avec des normes en théorie claires et harmonisées. Elle doit permettre, par exemple, d’exporter simplement des composants au sein de l’Union sans connaitre de barrières transnationales réglementaires majeures.

Photo transport par câble

La dernière réglementation en date est rentrée en application en avril 2018. Il ne semble pas que des changements particuliers soient attendus en la matière.

Recherche & innovation

               Du fait de sa maturité, le transport par câble n’est pas un secteur beaucoup abordé par les programmes européens de recherche. Certains projets ont cependant pu voir le jour sous le programme H2020, tournés vers l’innovation en matière de véhicules et d’optimisation des installations.

Sujets transverses

Afin de finaliser notre tour d’horizon des grands travaux réglementaires et des programmes importants, vous trouverez ici une partie réservée à des sujets transverses, touchant à une ou plusieurs filières de CARA.

L’élargissement du marché carbone au secteur du transport

               C’est l’une des promesses de la présidente de la Commission Ursula von der Leyen, faite l’année dernière à l’occasion du Sommet des dirigeants 2021 sur le climat organisé par les Etats-Unis. L’ETS a pour vocation d’encourager la réduction des émissions de certains secteurs clés par un système profitant d’un point de vue pécunier aux acteurs les moins polluants et sanctionnant les plus polluants.

Ce système pourrait donc venir s’étendre spécifiquement aux secteurs du transport routier et du transport maritime afin de forcer l’accélération de la réduction des émissions de GES dans ces secteurs clés. Cependant, rien n’est encore joué au Parlement européen alors que le vote de cette réforme approche, un résultat très serré devrait être attendu (le vote aura lieu du 6 au 9 juin 2022 au Parlement).

Nouvelle réglementation sur les batteries électriques

               Cette nouvelle réglementation (qui pourrait également n’être qu’un simple changement du règlement européen sur les batteries) qui n’a pas encore abouti concerne toutes les filières employant des véhicules utilisant des batteries électriques (et concerne toutes les batteries du marché européen au sens large). Ce règlement présente plusieurs ambitions : renforcer le marché européen des batteries, mettre en place une économie circulaire, réduire l’impact environnemental des batteries à toutes les étapes de leur cycle de vie.  Si les discussions et négociations sont encore en cours autour de ce texte, il n’y a que peu de doutes quant au fait que les obligations qui en découleront vont impacter le marché des batteries et donc par extension les filières de la mobilité en ayant l’usage. Le trilogue Conseil-Commission-Parlement a débuté le 20 avril 2022.

Concernant les batteries, il est également intéressant de souligner qu’il existe un partenariat public-privé leur étant dédié : BATT4EU (il rassemble la Commission européen pour la partie public, et la BEPA, un consortium de parties prenantes du secteur de la batterie, pour la partie privée). Ce partenariat publie un certain nombre d’appels à projets dans le cadre d’Horizon Europe, avec un spectre de recherche large allant du choix des matériaux au recyclage des batteries en passant par l’optimisation de leur usage.

La révision du Réseau transeuropéen de transport (RTE-T)

               Pour finir, voici un élément majeur de la politique européenne en matière de mobilité et d’environnement. Le RTE-T est en effet un réseau de transport à l’échelle européenne englobant de nombreux axes de transport dont : « les voies ferrées, les voies navigables intérieures, les voies de navigation maritime à courte distance et les routes reliées aux villes, aux ports maritimes et intérieurs, aux aéroports et aux terminaux » (source). Le but de la création d’un tel réseau à l’échelle européenne est double : connecter toute l’Europe et harmoniser ses réseaux de transport. En plus de ce rôle initial qui y participe déjà sous certains aspects, sa révision doit permettre d’accompagner le secteur des transports vers son objectif de réduction de ses émission de GES de 90% d’ici 2050. Cette révision devrait donc pousser à la mise en place d’infrastructures plus modernes (afin d’inclure notamment sur nos réseaux de nouveaux moyens de transport fonctionnant avec de nouveaux carburants comme l’hydrogène) et intégrer un système de transport multimodal plus complet. On peut souligner que cette révision, qui est toujours en cours de négociation, devrait faire la part-belle au transport ferroviaire avec des objectifs affichés très ambitieux pour cette filière en particulier.

Enfin, cette modernisation du RTE-T est accompagnée par un programme dédié : le Connecting Europe Facility (CEF) comprenant trois axes : le numérique, le transport et l’énergie. Ses derniers appels à projets sont en grande partie tournés vers l’installation de bornes de recharge pour véhicules fonctionnant aux nouveaux carburants (électricité, hydrogène, gaz naturel liquéfié), le réaménagement/modernisation des infrastructures portuaires des voies navigables intérieures, ou encore le parachèvement des lignes ferroviaires européennes. Des projets qui accompagnent donc d’autres thématiques abordées précédemment mais qui soulignent surtout l’importance de cette réglementation et des projets lui étant liés en sa qualité d’épine dorsale de la mobilité européenne.